Faux, le Burkina Faso n’exige pas de visa d’entrée sur son territoire aux pays membres de la CEDEAO

L’information selon laquelle le gouvernement burkinabè a voté une loi qui exige l’obtention d’un visa aux États membres de la CEDEAO avant à l’entrée sur son territoire est trompeuse.

Un message associé à une image diffusée sur le réseau social X affirme que le gouvernement burkinabè a décidé d’instaurer une demande de visa pour les ressortissants de la CEDEAO comme condition d’admission sur son territoire.

Le post qui date du 27 février 2024 a été visionné plus de 71 500 fois à la date du 2 avril 2024 et publié par le compte X Mevaly Diomandé. L’auteur écrit: « le gouvernement burkinabè décide d’instaurer le visa entre le Burkina Faso et les états de la CEDEAO. Très bonne nouvelle quand la balle vient de l’adversaire il n’y a pas hors-jeux ». Le message est accompagné d’une image montrant l’actuel président burkinabé de la transition, Ibrahim Traoré.

Il s’agit d’une information manipulée. Il est vrai que le Burkina Faso a récemment voté une loi portant sur les conditions d’entrée des étrangers sur son territoire. Cependant, la commission n’a pas annoncé son intention d’établir une loi portant sur les conditions d’entrée au Burkina Faso pour les pays membres de la CEDEAO. On vous explique.

Capture d’écran de la publication sur Twitter

Vérifications

Notre rédaction a contacté l’auteur de la publication le 29 mars 2024 pour avoir la source de son information, mais ce dernier n’a donné aucune réponse. 

Cette rumeur fait suite au retrait des trois pays de l’AES, notamment le Burkina Faso, le Mali et le Niger de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui regroupe 15 pays membres.

Comme l’indique Afrique Média, une chaîne de télévision panafricaine d’information multilingue, le 28 janvier 2024, les trois pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) à savoir le Mali, le Niger et le Burkina Faso, ont annoncé leur retrait de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Pour eux, la CEDEAO ne répondait plus aux attentes et aux besoins de leurs populations. 

La loi portant sur les conditions d’entrée des étrangers sur le territoire burkinabè a fait l’objet d’un reportage présenté dans le journal télévisé de 20h du 22 février 2024 de la Rtb (Radio-télévision du Burkina) diffusé en direct sur sa page Facebook. Le reportage précise que cette loi voté le 22 février 2024 a pour objectif de renforcer le dispositif juridique et institutionnel de gestion des flux migratoires du Burkina Faso et de mieux lutter contre le terrorisme. Le ministre délégué chargé de la sécurité, Mahamadou Sana, porteur du projet de loi à l’Assemblée législative a rappelé que cette loi définit les conditions d’entrée et de séjour au Burkina Faso. Mais il n’a pas été mentionné que le pays exige un visa d’entrée aux pays membres de la CEDEAO. 

Capture d’écran du journal de 20h

Une loi qui date de 1984

Au Burkina Faso, plusieurs médias sont revenus sur cette information. C’est le cas du média en ligne burkinabè Burkina 24 dans un article publié le 22 février 2022. Cette nouvelle loi est une relecture d’une loi qui date de 1984 et qui encadre les conditions d’entrée et de sortie des étrangers et des nationaux du Burkina Faso. L’objectif est de renforcer le dispositif juridique et institutionnel en matière de migration et d’actualiser l’ordonnance n°84-49/CNR/PRESSE du 4 août 1984 portant condition d’entrée de séjour et de sortie du Burkina Faso des nationaux et des étrangers.      

Le projet de loi constitué de 35 articles a été voté à l’unanimité par les 69 représentants du peuple. Les conditions d’entrée des étrangers sont définies dans l’article 6 qui précise que tout étranger sur le territoire national est tenu de se présenter au poste de la police frontalière chargée du contrôle de la migration, muni des documents dont le document de voyage en cours de validité, le carnet de santé (conformément à la réglementation internationale ou tout autre document exigé en cas de crise sanitaire) et un titre de transport retour.   

Avant cet article 6, l’article 5 indique que le séjour sur le territoire national burkinabè de l’étranger prend fin à l’expiration de la durée de validité de son visa ou la durée légale de son séjour autorisé, rapporte (ici et ici) le media Le Faso. 

Les pays membres de la CEDEAO exemptés de visa d’entrée au Burkina Faso 

Pour le moment, un passeport seul suffit pour les ressortissants des pays membres de la CEDEAO pour entrer au Burkina Faso.

C’est ce que précise (ici) le site internet du consulat général du Burkina Faso à Paris. « Le visa d’entrée et de séjour au Burkina Faso est accordé à tout citoyen d’un pays étranger, dont le pays ne bénéficie pas de facilité ou de gratuité du fait de l’existence d’un Accord bilatéral ou multilatéral. C’est ainsi que les ressortissants des 15 pays membres de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sont exemptés du visa d’entrée au Burkina Faso à la condition qu’ils voyagent avec le passeport de leur pays d’origine ».

Embassy Pages qui fournit des informations sur les ambassades et consulats du monde précise: « Les citoyens du Togo n’ont pas besoin de visa pour entrer au Burkina Faso…Aucun visa n’est nécessaire pour entrer au Burkina Faso »

Contacté par notre rédaction sur le sujet,  le consulat du Burkina Faso à Lomé a declaré que l’ information véhiculée sur les réseaux sociaux est fausse. Les citoyens des pays membres de la CEDEAO n’ont pas besoin d’un visa pour se rendre au Burkina Faso. 

Cette fausse information a été aussi démontée par l’Agence France Presse le 22 mars 2024. Au cours d’un point de presse organisé après le vote de la loi, le ministre délégué chargé de la Sécurité, Mahamadou Sana a expliqué (ici) que cette disposition ne concerne pas les pays où il y a exemption de visa. “il y a des traités communautaires qui font l’exemption de visa avec certains pays“, a-il précisé. 

Capture d’écran de l’article d’AFP

L’agence d’obtention de visa par correspondance et visa électronique, Visa en ligne précise sur son site internet que sont exemptés de visa au Burkina Faso les pays membres de la CEDEAO, notamment Bénin, Sénégal, Togo, Cap Vert, Ghana, Guinée, Libéria, Guinée Bissau, Niger, Côte d’Ivoire, Gambie, Sierra Leone, Nigéria et Mali. Ces derniers devront présenter une carte d’identité nationale ou un passeport valable pour entrer dans le pays. L’exemption entre en vigueur dans le cadre d’un séjour inférieur à 90 jours, c’est-à-dire, 3 mois.

Libre circulation des personnes dans la CEDEAO

Selon l’indice d’ouverture sur les visas en Afrique, Visa Openness Index, qui mesure le degré d’ouverture des pays africains aux visiteurs des autres pays du continent, la CEDEAO a adopté une position progressive en matière d’ouverture des régimes de visa depuis des décennies, qu’elle a officialisée en 1979 par un protocole sur la libre circulation des personnes, la résidence et l’établissement. 

La communauté a introduit en 2000, un passeport commun qui dispense ses détenteurs de visa pour voyager dans la région. Les débuts de mise en œuvre de l’Ecovisa, qui permet aux visiteurs extérieurs de la CEDEAO d’accéder au territoire de tous les États membres de la communauté, remontent à 2011.

L’information selon laquelle le gouvernement burkinabè a voté une loi qui exige l’obtention d’un visa aux États membres de la CEDEAO avant à l’entrée sur son territoire est trompeuse. Le gouvernement burkinabè a plutôt procédé à la révision d’une loi qui date de 1984 et qui vise à renforcer les mesures de sécurité dans le pays.

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