Situation sociopolitique au Togo: retour sur des intox diffusées lors des récentes manifestations en juin 2025

Certaines images montrant des femmes avec des hématomes sur le corps ne proviennent pas des récentes manifestations de juin 2025. Elles existent en ligne bien avant ces évènements.

Le Togo a été au cours du mois de juin 2025, la scène à plusieurs manifestations dans la capitale. Les 6, 26, 27 et 28 juin 2025 les populations se sont mobilisés dans plusieurs quartiers de Lomé pour une marche “pacifique”.

Ces manifestations ont été initiées sur les réseaux sociaux par des internautes et activistes pour protester notamment contre la nouvelle constitution, la hausse des prix, la détérioration des conditions de vie…

Dans ce contexte, plusieurs images et vidéos sur ces évènements ont inondé la toile. Certaines montrent des mouvements des manifestants, d’autres évoquent de violentes répressions des forces de l’ordre sur des manifestants. 

La rédaction de Togocheck fait le point sur ces séries d’images qui circulent sur les réseaux sociaux mais qui ne sont pas toutes liées au Togo.

Des images de femmes victimes…

Des captures d’images de femmes, avec des hématomes sur le corps, sont largement relayées sur les réseaux sociaux. Les auteurs de ces publications présentent ces captures comme étant des actes de tortures et violences exercées par les forces de l’ordre sur ces femmes au cours des récentes manifestations de  juin 2025 au Togo. 

Une publication a été faite le 12 juin 2025 sur la page Facebook de @Kodzo Mokpokpo Agbogan avec pour légende: “Ces images sont insoutenables. Si c’est confirmé que ce sont nos gendarmes qui ont frappé une togolaise comme cela, pour avoir juste osé manifester, c’est révoltant”

Capture de la publication sur Facebook

Le texte est accompagné de cinq clichés de femme. La première image montre une femme assise de dos, toute nue sur un lit dans une chambre, avec des blessures et pansements sur le dos, le corps couvert d’hématomes, la tête baissée entre ses jambes. 

La deuxième image qui est constituée de deux clichés identiques d’une autre femme, à moitié nue le visage couvert, portant un soutien gorge blanc et une culotte rouge, le bras couvert de larges hématomes. Sur les autres captures on voit deux mêmes images montrant la même femme dont le bras est couvert de bleus, qui montre son postérieur couvert de bleues.

La publication totalise à la date du 1er juillet 2025, 84 mentions j’aime, 44 commentaires et 55 partages. 

On retrouve également ces mêmes clichés sur instagram publiés par la page @togolais_du_monde_entier, le 11 juin 2025, accompagné du texte: “les images insoutenables de la barbarie des gendarmes de Antigang à Djidjole sur les femmes en plus: Ferdinand Ayité”. 

Capture de la publication sur Instagram

Parmi ces clichés, il y a une sixième image d’une autre femme à moitié nue couchée sur un lit, la partie postérieure couverte de bleues. Le texte qui accompagne indique: “L’image insoutenable d’une femme tabassée lors de son interpellation est actuellement montrée par Ferdinand Ayite au cours de son direct. Le journaliste affirme qu’il a d’autres images à sa disposition. Courage à toutes ces victimes. Nous sommes natifs du même pays et l’autre doit être considéré et traité comme soi-même. Nul n’a le droit de subir des traitements inhumains et dégradants  contre son prochain. La question est de savoir si les soldats qui ont brutalisé nos frères et sœurs qui revendiquent de bonnes conditions de vie pour nous tous vont profiter également de l’annulation des prix de l’électricité ?Que dit le procureur de la République dans tout ça ?”

Cette publication a reçu à la date du 2 juillet 2025, 1800 mentions “j’aime” , 202 commentaires et 223 partages. 

Depuis la mise en ligne de ces images, plusieurs comptes sociaux sur X, Facebook, Youtube les ont massivement relayées pour prétendre à de multiples actes de tortures et barbaries subis par ces femmes appréhendées lors de la manifestation du 6 juin 2025. Certains activistes et même certains sites web ont également partagé ces images.

Or, d’après les recoupements d’information aucune preuve tangible ne confirme que ces photographies sont reliées réellement aux manifestations du 6 juin 2025 au Togo. Aussi, certaines de ces images circulent sur la toile bien avant les manifestations.

Vérifications

La rédaction de Togocheck a joint l’auteur de ces publications le 25 juin 2025 sur le sujet mais n’a reçu aucune réponse.

Cependant, nous avons constaté quelques jours après leur mise en ligne qu’il a supprimé deux images parmi celles qu’il a publiées. Mais ces images ont continué à circuler sur internet.

Les recherches d’images inversées effectuées sur ces différentes images via les outils de vérifications d’images n’ont donné aucun résultat provenant d’organes de presse crédibles. 

Cependant d’autres recherches ont orienté vers une publication Facebook qui date du 28 juillet 2019 avec la description: “Les forces de l’ ordre du Togo voilà ce en quoi elles sont championnes”.  L’auteur a posté l’image montrant une femme de dos assise sur un lit avec des marques de blessures et de bleue sur le corps.

Capture la publication antérieure aux manifestations

Il est donc clair que cette image n’est pas liée aux récents événements du 6 juin 2025. 

D’autres recherches par mots clés n’ont permis de retrouver aucun article, ni déclaration officielle; aucun communiqué issu de sources de sécurités du Togo en ligne ne confirme les allégations répandues sur ces images diffusées en lien avec ces captures. Et aucune organisation de défense des droits de l’homme, ni de la société civile n’a publié des images des victimes de répressions. 

De plus, d’après les recherches nous n’avons pas trouvé d’indice qui confirme que les victimes faisaient partie des manifestants arrêtés et torturés comme le mentionnent les publications.

Une autre publication  en date du 27 juin 2025 faite par la page Facebook au nom de @François Xavier Assogbavi montre une femme assise et dont le dos est couvert de plaies, et d’hématomes. D’après son auteur, il s’agit d’une femme victime de repressions des agents des forces de l’ordre lors des manifestations du 26 juin 2025. 

Capture de la publication sur Facebook

Plusieurs utilisateurs sur diverses plateformes ont partagé cette image, l’attribuant à la manifestation du 26 juin 2025 avec les mêmes affirmations d’accusation sans pour autant s’interroger sur son authenticité.

Pourtant, d’après nos recherches, cette image  circulait sur la toile bien avant les manifestations du 26 juin 2025.

Les recherches inversées nous ont dirigés vers des publications en anglais qui datent de juin 2025. La première publication date du 1er juin 2025 et a été faite en anglais par un compte X. On retrouve dans cette publication trois images parmi lesquelles figure celle que nous vérifions. Selon l’ auteur, les faits se sont déroulés dans l’Etat de Cross River au Nigéria. 

Capture de la publication antérieure aux manifestations

Aucun rapport avec les manifestations du 26 juin 2025.

La même image avec les mêmes affirmations ont été également reprises en anglais à la même date par des comptes X et Facebook au Nigéria et au Malawi. Ces publications font cas d’un incident entre une femme et sa belle-mère; 

Il est donc clair que cette image montrant le dos d’une femme couvert d’hématomes n’a aucun rapport avec les  manifestations du 26 juin 2025 à Lomé.

En outre, suite à ces événements, l’Observatoire pour la Protection des Défenseurs des Droits Humains, en partenariat avec la Fédération Internationale pour les Droits Humains (FIDH) et l’Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT), ont publié le 13 juin 2025 un rapport sur les manifestations pacifiques qui ont eu lieu à Lomé, les 5 et 6 juin pour dénoncer des violences et des violations graves des droits humains. Ce rapport fait cas d’au moins 81 arrestations arbitraires et actes de torture contre les manifestants du 5 et 6 juin 2025. 

L’observatoire précise également dans le rapport, avoir été informé par 7 manifestants qui ont affirmé avoir fait l’objet d’actes de torture et de mauvais traitements pendant leur garde à vue. 

Toutefois, ledit rapport n’a ni cité, ni mentionné, ou rattaché aucune de ces images de victimes comme étant des actes de tortures qu’ont subi les manifestants au cours de leurs incarcérations. 

Conclusion

Toutes vérifications faites, les images qui montrent des femmes présentant des hématomes sur le corps sont sorties de leurs contextes. Elles n’ont aucun lien avec les manifestations de juin 2025 au Togo. 

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