Voyager ou se rendre dans certains lieux publics, depuis l’avènement de la crise sanitaire due à la Covid-19, est soumis à la présentation d’un test PCR négatif. Et la réalisation de ce test passe le plus souvent par des prélèvements nasopharyngés. Dans ce contexte, s’est répandue sur les réseaux sociaux l’information selon laquelle la multiplication ou la répétition des tests nasopharyngés ferait courir un risque pour la santé de ceux qui s’y soumettaient.
C’est le cas de ces publications faites courant 2020 et 2021, sur Facebook (1, 2, 3, 4), Twitter (ici) et des sites internet (1, 2, 3) qui indiquent que les écouvillons endommageraient notamment la barrière hémato-encéphalique qui protège le cerveau.
Des pages sur Facebook (Capture d’écran 1) indiquent que « Non seulement ces tests ne sont absolument pas fiables et ne veulent pas dire grand-chose, mais ils pourraient mettre gravement votre santé en danger ». Cet internaute précise pour sa part, sur Facebook (Capture d’écran 2) que « Au cours des 3 derniers mois j’ai perdu un ami proche après une série de tests nasal et mon amie a perdu ses 2 parents et la semaine dernière mon best body, son oncle. TOUS décédés 2-3 jours après avoir passé́ PLUSIEURS CUE SWAB dans le Nez ».
D’entrée, il faut noter qu’il existe principalement 3 types de tests pour détecter le virus de la Covid-19 chez un individu : virologiques, antigéniques et sérologiques. Les tests virologiques encore appelés RT-PCR et les tests antigéniques sont réalisés avec un prélèvement par voie nasale ou salivaire. Les tests sérologiques quant à eux détectent la présence d’anticorps au moyen d’une prise de sang.
A propos des raisons pour lesquelles un prélèvement nasopharyngé est nécessaire pour détecter le virus de la Covid-19, l’Académie Nationale de Médecine (France) sur son site internet, explique (ici) que « Dès la contamination, le SARS-CoV-2 se réplique dans les cellules de la muqueuse nasale, se propage tout au long des voies aériennes supérieures, puis dans l’arbre respiratoire. Le site idéal de prélèvement pour rechercher la présence de matériel génétique viral est le nasopharynx, les premières cibles du virus étant les cellules ciliées des voies aériennes supérieures. »
Ecouvillons et barrière hémato-encéphalique : pas de risque
La barrière hémato-encéphalique (1, 2) est une barrière physique et métabolique qui isole le cerveau du reste de l’organisme. Elle intervient quotidiennement dans la régulation de l’homéostasie cérébrale. Comme l’indiquent les informations partagées, cette barrière hémato-encéphalique est une protection du système nerveux. A contrario, l’écouvillon utilisé pour réaliser un test PCR ne touche pas cette barrière hémato-encéphalique (Capture d’écran)
A travers cette vidéo publiée par le New England Journal of Medicine sur YouTube (ici), on peut voir l’itinéraire de l’écouvillon inséré dans le nez lors de la réalisation d’un prélèvement nasopharyngé. Et il ne touche que le fond de la cavité nasale. Il faut noter également que la pratique des tests nasopharyngés ne sont pas récents, comme le montre cette vidéo publiée (ici) depuis novembre 2013 sur YouTube par la société médicale américaine, Puritan Medical Products Co., LLC.
John Dyer, professeur à l’université de Nouvelles-Galles du Sud (Australie) indique à l’AFP que, « l’écouvillon ne touche pas la barrière hémato-encéphalique et ne la met pas en danger. Cela ne menace en aucun cas notre système nerveux ». Le directeur de recherches CNRS au centre de Physiopathologie de Toulouse-Purpan. Daniel Dunia, dont les propos sont cités par TF1 (ici) explique : « Le nasopharynx où le prélèvement a lieu ne se situe pas au même endroit que la barrière hémato-encéphalique. Pour l’atteindre, (…) il faudrait traverser la muqueuse et que le coton perfore l’os du crâne. C’est impossible ! »
Tests PCR et risques pour la santé : De très rares cas documentés
Dans un communiqué de presse publié le 8 avril 2021, l’Académie Nationale de Médecine a mis en lumière certains risques liés aux prélèvements nasopharyngés pour diagnostiquer l’infection par le SRAS-CoV-2. En effet, même si la réalisation desdits prélèvements est décrite comme inoffensive, de rares cas de complications ont été observés d’après des revues scientifiques.
L’institution française, s’appuyant sur « trois cas relevés dans des revues scientifiques notamment l’European Respiratory Journal, l’European Journal of Neurology et la revue médicale JAMA », indique que « Au vu de la multiplication et de la répétition de cette procédure de prélèvement, parfois réalisée dans des conditions inadaptées, il est important de rappeler les précautions à observer et les risques encourus. ». Au rang de ces risques, on retrouve des « complications (pouvant) être considérées comme bénignes (gêne, douleur ou saignement), », mais aussi « des complications graves (…) notamment des brèches de la base antérieure du crâne associées à un risque de méningite ».
L’une des complications documentées (1, 2) par les scientifiques et un cas de « Méningite due à une fuite de liquide céphalo-rachidien après un test d’écouvillonnage nasal pour COVID-19 » publié par la Revue Européenne de Neurologie le 28 novembre 2021.
Mais, à ce propos, Dr Nicolas Boulanger, médecin ORL et chirurgien cervico-facial interrogé par 20 minutes est dubitatif. « Je ne vois même pas comment une telle brèche pourrait se faire sur ce type de prélèvements, sauf à ce qu’il y ait une conjonction de facteurs : est-ce le préleveur qui a fait une fausse route et forcé sur un patient qui avait une malformation ou une pathologie pour aboutir à ce qui me semble être une complication rarissime ? », questionne-t-il (ici). Mais, rassure-t-il « il n’y a pour ainsi dire pas de risque d’avoir une méningite après un test PCR ou antigénique ». Interrogé en avril dernier par Sud-Ouest, l’ORL Jean-Marc Juvanon expliquait lui aussi que ces risques sont connus mais qu’ils restaient « très rares, car l’écouvillon est flexible (…) Il faut vraiment forcer pour perforer et provoquer une méningite. Le risque de complications graves est exceptionnel »
Plusieurs autres médecins interrogés sur les probables risques liés à la répétition des tests nasopharyngés approuvent qu’ils puissent exister, tout en rassurant qu’ils sont d’une extrême rareté. Rayan Sater, biologiste, membre du Syndicat des Jeunes biologistes, interrogé par la BFMTV.com, explique que le test nasopharyngé est un geste médical invasif qui a très rarement des conséquences graves. Mais, précise-t-il, comme tout acte médical, il y a parfois une marge d’erreurs. Arthur Clément, médecin biologiste au Laboratoire Clément, indique à BFMTV le 2 février 2022 que s’il est bien réalisé, “le prélèvement ne présente aucun risque car il n’y a aucune effraction de muqueuse, car l’écouvillon reste dans le conduit nasopharyngé”.
Docteur Prisca Talboussouma, responsable du centre de santé d’Amoutivé dans la Commune du Golfe 4 à Lomé et personne ressource sur les questions liées à la Covid-19, contactée par Togocheck le 2 mars 2022, a déclaré que multiplier des tests de dépistage n’est en rien dangereux s’ils sont bien pratiqués. Pour ceux qui le font fréquemment à cause des voyages, c’est la sensation désagréable qui peut poser un problème.
Docteur Nicolas Boulanger confirme également que la réalisation d’un test PCR ” répété ou mal maîtrisé, peut effectivement causer douleurs et saignements”. Pour éviter les désagréments, l’Académie nationale de médecine indique pour sa part qu’il s’agit d’un geste technique qui doit être confié « aux professionnels de santé formés pour la réalisation de ce geste dans des conditions techniques rigoureuses ».
En conclusion
Même si le prélèvement nasopharyngé peut créer de l’inconfort, sa réalisation ou sa répétition n’entraîne aucun effet négatif sur la santé s’il est bien réalisé et dans les bonnes conditions. Par ailleurs, l’information selon laquelle l’écouvillon utilisé pour réaliser le prélèvement nasopharyngé endommage la barrière hémato-encéphalique, n’est avérée.